Soir 2 -
Causette à la buvette avec Lucie Leguay, cheffe d’orchestre

le vendredi 10 septembre,
à 21h20...

propos recueillis par
Corinne Schneider

Je suis heureuse de participer à ce nouveau Festival qui réunit autant d’ensembles de qualité, avec cette idée si intéressante de réunir quelques musiciens de chaque ensemble dans deux concerts croisés. Evidemment, la musique de création demande beaucoup de précision et il faut adapter sa technique de direction à ce répertoire : les gestes sont différents. Je trouve beaucoup de plaisir dans cette immersion festivalière à écouter et voir diriger tous les chefs invités : Julien Leroy, Guillaume Bourgogne, Jean Deroyer, Léo Margue… Ils ont chacun une personnalité très marquée, mais un point commun : une très grande précision dans leurs gestes.

En tant que cheffe assistante de Matthias Pintscher à l’Ensemble Contemporain et aussi en travaillant avec Peter Eötvös à Budapest, j’ai beaucoup appris à la fois sur la direction d’orchestre mais aussi sur la création, car ils sont tous les deux de très grands compositeurs. Avec Peter Eötvos, c’est l’école de la précision et du détail ! Chaque note, chaque son a une signification avec le geste. Sa personnalité est peut-être plus introvertie que celle de Matthias Pintscher, mais très généreuse. Matthias Pintscher a tissé une relation très particulière avec les musiciens de l’Ensemble Intercontemporain : ils sont très proches. Il est si inspirant lorsqu’il amène les musiciens à découvrir une œuvre nouvelle ; il a une manière bien à lui, joyeuse, d’amener l’ensemble vers la découverte, qui respire et qui inspire.

Quand j’aborde une œuvre nouvelle qui n’a jamais été jouée, je préfère d’abord me faire une idée seule, en travaillant la partition à la table.

J’essaie de comprendre, à travers les lignes, les souhaits du compositeur ou de la compositrice. Ensuite, je fais une première lecture avec l’auteur dans la salle afin qu’il puisse entendre ce qu’il a écrit. Enfin, je vais vers elle ou lui pour échanger et faire des ajustements. Ce moment-là est vraiment un laboratoire parce qu’on travaille ensemble. Je suis convaincue du fait que les chefs d’orchestre vraiment intéressés et investis dans le champs de la création contemporaine peuvent faire évoluer une œuvre. Au moment de la création, mais aussi en reprenant les pièces nouvelles et en les interprétant plusieurs fois ; chaque nouvelle exécution est une nouvelle interprétation, et l’œuvre y gagne.

Pour Arc aux Six couleurs, la nouvelle œuvre de Manon Lepauvre que nous allons créer en public ce soir, j’ai appris la partition avant de rencontrer la compositrice.

J’ai ensuite travaillé avec les musiciens de l’ensemble Sillages, à Brest, en présence de Manon. Au cours de ces séances de travail, comme au sein d’un laboratoire, en fonction des retours des musiciens, des miens et de ceux de Gonzalo Bustos, elle a modifié des aspects de sa partition : la fin et le passage du milieu. On peut vraiment dire que le travail ensemble lui a permis d’aller plus loin dans la réalisation de ce qu’elle souhaitait. Les œuvres nouvelles ont tout à gagner du travail de proximité entre le chef et le créateur. La création à laquelle vous allez assister ce soir est donc le fruit d’un travail antérieur et s’intègre dans un compagnonnage plus global autour de l’œuvre. On se retrouve dans un mois à Madrid pour redonner Arc aux six couleurs une deuxième fois en public, puis enfin à Brest, une troisième fois.

Nous avons beaucoup de chance en France car c’est un pays qui a un réel intérêt pour la musique de création et beaucoup de créateurs de grande qualité y vivent.

Les endroits où l’on peut étudier les répertoires d’aujourd’hui sont aussi nombreux. En tant que cheffe d’orchestre, je pense que la présence de la musique d’aujourd’hui est nécessaire et qu’elle devrait figurer au sein de chaque programme de concert, mêlée au répertoire patrimonial. La question est celle de l’ouverture du public et de son éducation à la curiosité. Je pense que le chef peut être médiateur des musiques de création dans les grands concerts symphoniques attractifs en donnant quelques clés au public. Quand on présente une œuvre nouvelle au public, il est nécessaire de l’accompagner d’une part et d’autre part de bien pense le programme afin de pouvoir tisser des liens musicaux entre les répertoires. Les œuvres du patrimoine peuvent gagner au compagnonnage des musiques contemporaines ; elles adoptent un autre visage en se trouvant pleinement revisitées par notre époque. 

Soir 2 -
Causette à la buvette avec Lucie Leguay, cheffe d’orchestre

le vendredi 10 septembre, à 21h20...

propos recueillis par Corinne Schneider

Je suis heureuse de participer à ce nouveau Festival qui réunit autant d’ensembles de qualité, avec cette idée si intéressante de réunir quelques musiciens de chaque ensemble dans deux concerts croisés. Evidemment, la musique de création demande beaucoup de précision et il faut adapter sa technique de direction à ce répertoire : les gestes sont différents. Je trouve beaucoup de plaisir dans cette immersion festivalière à écouter et voir diriger tous les chefs invités : Julien Leroy, Guillaume Bourgogne, Jean Deroyer, Léo Margue… Ils ont chacun une personnalité très marquée, mais un point commun : une très grande précision dans leurs gestes.

En tant que cheffe assistante de Matthias Pintscher à l’Ensemble Contemporain et aussi en travaillant avec Peter Eötvös à Budapest, j’ai beaucoup appris à la fois sur la direction d’orchestre mais aussi sur la création, car ils sont tous les deux de très grands compositeurs. Avec Peter Eötvos, c’est l’école de la précision et du détail ! Chaque note, chaque son a une signification avec le geste. Sa personnalité est peut-être plus introvertie que celle de Matthias Pintscher, mais très généreuse. Matthias Pintscher a tissé une relation très particulière avec les musiciens de l’Ensemble Intercontemporain : ils sont très proches. Il est si inspirant lorsqu’il amène les musiciens à découvrir une œuvre nouvelle ; il a une manière bien à lui, joyeuse, d’amener l’ensemble vers la découverte, qui respire et qui inspire.

Quand j’aborde une œuvre nouvelle qui n’a jamais été jouée, je préfère d’abord me faire une idée seule, en travaillant la partition à la table.

J’essaie de comprendre, à travers les lignes, les souhaits du compositeur ou de la compositrice. Ensuite, je fais une première lecture avec l’auteur dans la salle afin qu’il puisse entendre ce qu’il a écrit. Enfin, je vais vers elle ou lui pour échanger et faire des ajustements. Ce moment-là est vraiment un laboratoire parce qu’on travaille ensemble. Je suis convaincue du fait que les chefs d’orchestre vraiment intéressés et investis dans le champs de la création contemporaine peuvent faire évoluer une œuvre. Au moment de la création, mais aussi en reprenant les pièces nouvelles et en les interprétant plusieurs fois ; chaque nouvelle exécution est une nouvelle interprétation, et l’œuvre y gagne.

Pour Arc aux Six couleurs, la nouvelle œuvre de Manon Lepauvre que nous allons créer en public ce soir, j’ai appris la partition avant de rencontrer la compositrice.

J’ai ensuite travaillé avec les musiciens de l’ensemble Sillages, à Brest, en présence de Manon. Au cours de ces séances de travail, comme au sein d’un laboratoire, en fonction des retours des musiciens, des miens et de ceux de Gonzalo Bustos, elle a modifié des aspects de sa partition : la fin et le passage du milieu. On peut vraiment dire que le travail ensemble lui a permis d’aller plus loin dans la réalisation de ce qu’elle souhaitait. Les œuvres nouvelles ont tout à gagner du travail de proximité entre le chef et le créateur. La création à laquelle vous allez assister ce soir est donc le fruit d’un travail antérieur et s’intègre dans un compagnonnage plus global autour de l’œuvre. On se retrouve dans un mois à Madrid pour redonner Arc aux Six couleurs une deuxième fois en public, puis enfin à Brest, une troisième fois.

Nous avons beaucoup de chance en France car c’est un pays qui a un réel intérêt pour la musique de création et beaucoup de créateurs de grande qualité y vivent.

Les endroits où l’on peut étudier les répertoires d’aujourd’hui sont aussi nombreux. En tant que cheffe d’orchestre, je pense que la présence de la musique d’aujourd’hui est nécessaire et qu’elle devrait figurer au sein de chaque programme de concert, mêlée au répertoire patrimonial. La question est celle de l’ouverture du public et de son éducation à la curiosité. Je pense que le chef peut être médiateur des musiques de création dans les grands concerts symphoniques attractifs en donnant quelques clés au public. Quand on présente une œuvre nouvelle au public, il est nécessaire de l’accompagner d’une part et d’autre part de bien penser le programme afin de pouvoir tisser des liens musicaux entre les répertoires. Les œuvres du patrimoine peuvent gagner au compagnonnage des musiques contemporaines ; elles adoptent un autre visage en se trouvant pleinement revisitées par notre époque.