Feuillages donne à écouter et à comprendre ce qu’est un geste musical et comment les compositeurs et compositrices d’aujourd’hui se sont attachés à l’écrire, à le figurer et par quels procédés des plus inventifs ils ont trouvé moyen de représenter graphiquement ou typographiquement ces gestes qui en découlent. Feuillages est l’image poétique de ces partitions, de ces notations où sont contenus les gestes cachés, loin du solfège traditionnel. Ce projet de l’Ensemble Cairn propose de mettre en lumière les gestes et les notations de ces sons inouïs en plaçant au centre de son concert la pièce de György Ligeti, Artikulation composée pour bande-son en 1958 puis réalisée visuellement par Rainer Wehinger à laquelle répond la pièce Exigüe (contigüe) de Julien Malaussena véritablement une musique électroacoustique réalisée par des instruments autour d’une partition quasi graphique. Catalogue de l’inaudible de Dmitri Kourliandsky explore, quant à elle, « l’inaudibilité » contenu dans certains gestes d’écriture : phrases interrompues, voix fantômes, effet de dissimulation comme dans ces jardins de pierres japonais où l’une des pierres, pourtant au centre même du dispositif, est toujours cachée. La création que le compositeur italien Marco Momi imagine pour ce concert, Pas encore, s’intéresse aux premières étapes, aux promesses d’une « oeuvre » qui se transmettent depuis le premier signe jusqu’au premier geste du musicien. Il s’agit d’une pièce où l’écriture cherche à ne rien fixer mais propose des ouvertures, des clairières dans ce feuillage de notations, un espace dans lequel les sons seraient comme suspendus. Paludes signifie marécages, et la partition de Tristan Murail explore tout une faune de sons grouillants et devient « le jeu de désirs et d’idées peu compatibles, le travail d’un matériau modeste et ingrat (pierres et vase…) – sans oublier « l’étude des petits potamogétons. »